BIentôt novembre
Un texte d'octobre dernier resté dans les brouillons... Dans la série "états d'âme de la quarantaine" ;-)
Tu nous vois, là, sur la plage? La grande blonde c’est pas moi, la grande brune qui parle fort non plus. On a toutes plus ou moins le même âge. Les deux ans qui étaient un fossé au lycée ne sont plus rien maintenant. Je fais juste un blocage avec les 40 ans d’A. qui me paraissent inenvisageables: A. a 8 mois de moins que moi; elle est donc bien plus jeune. Pareil avec M. qui est de décembre alors que je suis d’avril: c’est moi la plus grande. Mais peu importe. C’est bientôt novembre. On s’est retrouvées on ne sait trop comment; d’habitude les zones de vacances, les impératifs, les retours en France… font qu’on n’y arrive pas. C’est bientôt novembre et il fait incroyablement doux. On a de la chance. La mer est haute, et sur cette côte, elle ne se retire pas trop loin. On marche à la limite entre sable mouillé et sable sec. Le sable et le sel font des traces blanches sur nos chaussures. Presque 40 ans qu’on se connaît, ou bien 20, c’est déjà pas mal aussi. On s’est quelquefois éloignées, au gré de nos rencontres, de nos études, de nos voyages. Jamais vraiment perdues de vue et retrouvées maintenant, avec nos vies plus ou moins stables et nos enfants. Elles en ont toutes deux et j’en ai trois, c’est comme ça. On les a eus un peu tard, fichues études longues/fichus détours de la vie… Mais peu importe aussi. Ils sont loin devant, ils courent et ont formé des groupes par âges et par affinités. Ils sont chouettes, ces mômes: on a au moins réussi ça. Nous on marche derrière, on parle de tout et n’importe quoi, on constate que nos vies ne ressemblent en rien à ce qu’on aurait pu prévoir. On a toutes bac+beaucoup et on sait que ça ne change rien à l’affaire. Nos carrières sont hésitantes pour la plupart (voire inexistante pour moi!). Deux d’entre nous sont en pleine séparation et c’est pas la joie. Nos parents nous tracassent à différents degrés, ou nous aident, parfois. On rit beaucoup malgré tout, parce que la vie nous fait parfois des blagues impayables. En nous voyant de loin, on se dit que tout va bien. D’ailleurs c’est le cas, puisqu’on est là! Les tempêtes, on fait avec. On avance malgré tout, tant bien que mal. On avance et la nuit commence à tomber; c’est bientôt novembre tout de même. On va rentrer se faire du thé, avant de repartir chacune de son côté, chacune avec ses 40 ans, ses enfants, et sa vie en chantier...